L’Inde et la France entendent faire de l’économie bleue un moteur de progrès de leurs sociétés respectives tout en respectant l’environnement et la biodiversité côtière et marine. Les deux pays visent à contribuer à la connaissance scientifique et à la conservation des océans et à faire en sorte que l’océan reste un commun mondial, un espace de liberté et de commerce, fondé sur l’état de droit.
L’Inde et la France souhaitent contribuer à l’Objectif de développement Durable #14 du Programme de développement durable des Nations Unies, qui vise à conserver et à utiliser durablement les océans, les mers et les ressources marines. À cette fin, ils entendent agir en conformité avec le droit international, en particulier la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer, l’Accord de Paris sur le climat, la Convention sur la Diversité Biologique, la Convention Internationale pour la Prévention de la Pollution par les Navires, y compris la stratégie initiale de réduction des émissions de gaz à effet de serre des navires, adoptée dans le cadre de l’Organisation Maritime Internationale. Ils apportent leur soutien à la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030).
L’Inde et la France sont conscientes que l’océan a subi les effets néfastes du réchauffement climatique et de la pollution due aux activités humaines qui se manifestent principalement par des phénomènes d’acidification, un stress accru sur les ressources minérales et biologiques naturelles, une chute des stocks de poissons, des déplacements et une perte de diversité marine, la pollution – y compris la pollution plastique – l’érosion côtière et l’élévation du niveau de la mer.
Comme le souligne la Déclaration commune Inde-France adoptée le 22 août 2019, à l’occasion de la visite en France du Premier ministre indien, “L’Inde et la France sont convenues que les océans jouent un rôle important dans la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité et le développement, et, reconnaissant le lien entre environnement et sécurité, ont décidé d’élargir le champ de leur coopération maritime pour répondre à ces questions. Pour une utilisation durable des ressources marines, les Parties travailleront à la gouvernance des océans, notamment par la coordination au sein des organismes internationaux compétents. L’économie bleue et la résilience côtière sont une priorité commune pour l’Inde et la France. À cet égard, les deux Parties ont convenu d’explorer le potentiel de collaboration dans la recherche en sciences marines pour une meilleure compréhension des océans, y compris l’océan Indien.”
L’Inde et la France soulignent que la pêche est un secteur économique vital et joue un rôle décisif dans la sécurité alimentaire et la sécurité des moyens d’existence, en particulier pour les populations côtières. Ils soulignent également que des facteurs démographiques, économiques et sociétaux ont entraîné une augmentation de la demande mondiale de produits marins et un stress croissant sur les stocks mondiaux de poissons. Ils appellent ainsi à une approche durable de la pêche qui garantirait des conditions de vie décentes aux professionnels du secteur, tout en conservant la ressource à moyen et long terme, en tenant compte des lignes directrices volontaires de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture pour assurer une pêche artisanale durable dans le contexte de la sécurité alimentaire et de l’éradication de la pauvreté.
L’Inde et la France entretiennent un dialogue de haute qualité sur la sécurité maritime, qui leur permet de soulever des questions stratégiques dans l’Indo-Pacifique. Ce partenariat marque une avancée significative dans la coopération Inde-France en matière de sécurité maritime.
En outre, un protocole d’accord a été signé entre le Ministère de la Transition écologique (MTE) et le Ministère de l’Environnement, des Forêts et du Changement climatique (MoEFCC) en 2018, donnant lieu à un groupe de travail sur l’environnement, qui soulève des questions urgentes sur le changement climatique, la qualité de l’air, les aires protégées et la biodiversité, entre autres. Sans préjudice du groupe de dialogue et de travail susmentionné, dont les domaines d’action ne seront pas affectés, l’Inde et la France souhaitent développer un nouvel espace de coopération sur l’économie bleue et la gouvernance des océans.
L’Inde et la France s’engagent également à promouvoir la coopération entre l’Union européenne et l’Inde sur l’économie bleue et la gouvernance des océans, dans le cadre de la feuille de route commune “Partenariat stratégique UE-Inde : Une feuille de route à l’horizon 2025” et de la stratégie de coopération de l’UE dans l’Indo-Pacifique.
Compte tenu des paragraphes précédents, les parties indienne et française adopteront cette feuille de route afin de renforcer leurs échanges bilatéraux sur l’économie bleue et la gouvernance océanique.
L’Inde et la France envisagent de mettre en place un partenariat Inde-France sur l’économie bleue et la gouvernance des océans dont le champ d’application englobera le commerce maritime, le commerce maritime des services, les ports, l’industrie navale, la pêche, les technologies marines et la recherche scientifique, l’observation des océans, les services de modélisation et de prévision des océans, la biodiversité marine, les aires marines protégées, les énergies marines renouvelables, les industries manufacturières marines, la gestion écosystémique marine et la gestion intégrée des côtes, l’écotourisme marin, les voies navigables intérieures, la coopération entre les administrations compétentes sur les questions maritimes civiles, l’aménagement de l’espace marin ainsi que le droit international de la mer et les négociations multilatérales connexes.
Les signataires veilleront à ce que les ministères et institutions compétents soient associés à ce partenariat qui aura une dimension interministérielle et inclura, le cas échéant, le secteur privé.
Pour échanger leurs points de vue sur leurs priorités, partager leurs meilleures pratiques et soutenir la coopération en cours et à venir, l’Inde et la France prévoient d’organiser un dialogue bilatéral annuel sur l’économie bleue et la gouvernance des océans. Le dialogue jouera un rôle moteur dans la formulation, l’organisation et le suivi des projets de coopération dans les quatre piliers du partenariat : (i.) institutionnel, (ii.) économique, (iii) infrastructures, (iv.) scientifique et académique.
Le NITI Aayog en Inde, et l’Ambassadeur des Pôles et des Affaires Maritimes au Ministère des Affaires étrangères en France seront des points de contact pour coordonner l’organisation de ce dialogue et assurer l’implication des ministères compétents.
L’Inde et la France sont attachées au droit international de la mer et à son respect sur toutes les mers et tous les océans. Afin de renforcer le droit international de la mer et de s’adapter aux nouveaux défis, ils coordonneront leurs positions dans les instances multilatérales et les négociations, qu’il s’agisse de l’Autorité internationale des fonds marins, de l’Organisation maritime internationale, des conventions maritimes régionales traitant des affaires maritimes et lorsqu’ils sont les deux Parties, ou de la Conférence intergouvernementale sur un instrument international juridiquement contraignant au titre de la CNUDM sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale (BBNJ), entre autres. Ils tiendront des discussions sur le développement et le renforcement des aires marines protégées à travers le monde, en particulier dans le cadre des négociations sur le futur cadre mondial pour la biodiversité. Ils renforceront également leur coordination en vue de la cinquième session de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement en 2022 afin de soutenir l’ouverture de négociations en vue d’un accord mondial sur les déchets plastiques marins et les microplastiques.
Plus largement, chaque signataire impliquera régulièrement l’autre dans les conférences, ateliers et colloques sur l’économie bleue et la gouvernance océanique qu’il est susceptible d’organiser.
Le signataire français réitère son invitation à ce qu’une délégation interministérielle indienne se rende en France pour rencontrer l’écosystème de l’économie bleue dès que la situation de santé publique le permettra.
L’Inde et la France feront de l’économie bleue une priorité dans le développement de leurs échanges économiques. Ils faciliteront les contacts entre les acteurs économiques, les organisations de chefs d’entreprise, les technopoles et les clusters maritimes des deux pays, les investissements croisés, ainsi que la délivrance de visas aux entrepreneurs actifs dans l’économie bleue.
L’Inde et la France se réjouissent que le » Campus mondial de la mer ” en France ait proposé de faire de l’Inde l’invitée d’honneur de la Sea Tech Week à Brest du 26 au 30 septembre 2022, qui sera l’occasion de dynamiser les partenariats industriels et les innovations de l’économie bleue. Compte tenu de l’accent mis sur le thème “Transport maritime: vers des solutions plus intelligentes et plus vertes” lors de la Sea Tech Week 2022, les deux pays travailleront en étroite collaboration avec leurs entreprises du transport maritime, de la gestion portuaire, de la logistique, du démantèlement de navires, des chantiers navals, des fabricants d’équipements navals et d’autres industries de fabrication marine pour contribuer aux préparatifs de cet événement. Les deux pays peuvent également travailler ensemble pour développer des projets appropriés pour promouvoir les PME maritimes et la construction navale et la réduction des émissions marines, ainsi que des carburants marins alternatifs et plus propres, à faible teneur en carbone et à zéro carbone. Le « Campus mondial de la mer” à Brest et l’Ambassade de France en Inde, pour la France, ainsi que le Ministère de la Marine Marchande, des Ports et des Voies Navigables, et la Fédération des Chambres de Commerce et d’Industrie Indiennes, pour l’Inde, seront les points de contact pour préparer la participation d’une grande délégation indienne à la Sea Tech Week 2022.
Les signataires se félicitent des discussions en cours entre l’Agence Française de Développement (AFD) et le Ministère de la Pêche du Gouvernement indien, en vue de mettre en place un programme de soutien au secteur de la pêche durable en Inde, et encouragent leur poursuite. Des projets dans le domaine de l’économie bleue pourraient éventuellement être prévus pour non seulement aider à travailler sur la gestion durable des ressources halieutiques (et potentiellement d’autres sujets connexes tels que l’aquaculture, les ports écologiques de pêche, la gestion intégrée des zones côtières, l’observation par satellite), mais aussi pour renforcer les capacités des parties prenantes par d’éventuels échanges techniques. Ils encouragent également de nouvelles discussions sur les ports verts avec l’Association des ports indiens afin de promouvoir une connectivité plus durable dans la région Indo-Pacifique.
Compte tenu de l’expertise française en aquaculture, la France et l’Inde travailleront au développement commercial de nouvelles technologies agricoles, au développement conjoint dans l’élevage d’organismes marins pour l’alimentation, et d’autres produits tels que les produits pharmaceutiques et les bijoux, de manière à ne pas nuire à l’environnement. Cela peut inclure le développement conjoint de banques de couvées, de centres de reproduction de noyaux, d’écloseries et de pépinières, l’approvisionnement en aliments et des études conjointes pour la prévention des maladies aquatiques.
L’Inde cherche à développer ses ports, en mettant l’accent sur des infrastructures durables, y compris des ports écologiques de pêche. À cet égard, les deux parties encourageront le partage des connaissances et des méthodologies pour améliorer les infrastructures actuelles, accroître leur résilience au changement climatique, augmenter la capacité portuaire, développer des installations de stockage, des infrastructures plug and play dans les ports, avec un accent particulier sur le développement de « ports verts et intelligents » équipés de dragage durable et de recyclage des navires, qui est également l’un des domaines prioritaires de la France et implique une approche zéro déchet et d’économie circulaire. Cette coopération peut également s’étendre au développement d’équipements, par exemple sur les équipements de dragage, les navires / bateaux de pêche, les chalutiers, les pièces de rechange et les services de réparation, le câblage sous-marin et son entretien, la fabrication de glace, la corde, les engins de filet et les équipements marins.
En outre, ils coopéreront au développement des voies navigables intérieures, qui est l’une des priorités de l’Inde dans le domaine du développement des infrastructures. Cela peut inclure l’amélioration des infrastructures, le développement des chenaux, les aides à la navigation, les systèmes d’information fluviale.
Convaincus que la recherche en sciences et technologies marines est indispensable au suivi, à la protection et à l’utilisation durable des ressources marines vivantes et non vivantes et de la biodiversité des mers et de l’océan, l’Inde et la France renforceront leur coopération scientifique ainsi que les échanges d’étudiants et de chercheurs. L’océanographie physique et spatiale, les études d’impact environnemental, la lutte contre la pollution marine, la connaissance et la conservation de la biodiversité et des écosystèmes et services marins, la cartographie génétique de la biodiversité, la production d’un inventaire du matériel génétique, les approches écosystémiques, la surveillance des stocks de poissons, les techniques de pêche, la mise en valeur des stocks, l’observation des océans, la météorologie marine, la technologie d’exploration en haute mer, la technologie de l’océanarium ou le laboratoire sous-marin peu profond, les observations in situ des organismes marins, l’énergie marine, pourraient notamment être des domaines de coopération renforcée.
En outre, l’étude des impacts cumulatifs de multiples facteurs de stress sur le milieu marin, notamment l’acidification des océans, les pollutions et les phénomènes météorologiques extrêmes; les risques côtiers et la résilience peuvent également renforcer la coopération scientifique entre l’Inde et la France dans le domaine de l’Économie Bleue et de la Gouvernance des Océans. Des services de prévision océanique fiables et précis sont au cœur de toutes les parties prenantes de l’économie bleue pour les opérations quotidiennes, la planification à long terme et l’atténuation des catastrophes. Collaboration entre les centres opérationnels de prévision océanique en Inde (p. ex. INCOIS) et la France (par exemple l’IFREMER) est envisagée pour les observations océaniques, la modélisation et la prévision océaniques et le renforcement des capacités connexes.
L’Inde et la France resteront pleinement engagées dans le Sommet de la connaissance, organisé périodiquement par la France et l’Inde pour favoriser la coopération scientifique bilatérale. Le département scientifique de l’Ambassade de France en Inde et le Ministère indien des Sciences de la Terre seront les points de contact pour jeter les bases d’un atelier dédié aux sciences marines lors du Sommet de la Connaissance.
La France souhaite également envoyer rapidement un groupe d’experts scientifiques en Inde afin de rencontrer les principaux instituts océanographiques indiens tels que le Centre National Indien des Services d’Information Océanique (INCOIS), l’Institut National de Technologie Océanique (NIOT) et l’Institut National d’Océanographie (NIO), ainsi que le Centre National de Gestion Durable du Littoral. L’Inde se félicite d’une telle visite, dont elle facilitera l’organisation.
L’IFREMER, l’Institut national français des sciences et technologies océaniques et le Ministère indien des Sciences de la Terre ont entamé des contacts afin d’approfondir le potentiel de coopération, notamment dans le cadre de la mission Deep Ocean.
Le CNRS, Centre National de la Recherche Scientifique, affiche son intérêt à collaborer en Biologie Marine et en Biotechnologie, dans le cadre de l’accord CNRS-DBT, et aussi éventuellement dans le cadre de la Station Marine Avancée de Biologie Océanique, annoncée comme l’une des composantes majeures de la Mission Deep Ocean proposée par le Ministère des Sciences de la Terre en 2021.
L’Inde et la France se réjouissent du lancement du programme de coopération universitaire et scientifique GOAT (Goa ATlantic cooperation in Marine Science and Technology) signé à Brest le 20 janvier 2020, entre les acteurs français du “ Campus mondial de la mer ” et l’Indian Institute of Technology de Goa. Ils appuieront sa mise en œuvre et faciliteront la délivrance de visas pour les étudiants et les chercheurs impliqués. L’Inde et la France souhaitent encourager la mobilité des étudiants dans le secteur de l’économie bleue et dans les sciences et technologies marines. Ils appellent au développement de partenariats entre les établissements d’enseignement supérieur.
Afin d’encourager les partenariats scientifiques en sciences de la mer, l’Ambassade de France en Inde s’efforcera, à partir de 2022, d’octroyer cinq bourses de mobilité étudiante dans ce domaine. L’Inde facilitera les aspects administratifs de la mise en œuvre de tels partenariats.
L’Inde et la France chercheront un financement privé pour créer un Centre de R & D pour soutenir des projets communs et s’efforceront d’encourager et de soutenir des projets sur l’économie bleue et la connaissance de l’océan dans le cadre du Centre Indo-Français pour la Promotion de la Recherche Avancée (CEFIPRA / IFCPAR).
L’Inde et la France encourageront la coopération scientifique entre leurs institutions de recherche et faciliteront les procédures administratives, telles que la délivrance de visas et les autorisations nécessaires pour les personnes impliquées dans la recherche.
Adopté à Paris, le 20 février 2022, en anglais et en français.