Une nouvelle génération de cinéastes scandinaves fait des vagues, sur les traces d’Ingmar Bergman, de Lars von Trier et du mouvement Dogme, avec trois réalisateurs en compétition à Cannes cette année.
Le réalisateur culte suédois Ruben Ostlund, Palme d’Or 2017 pour “The Square”, est de retour avec “Triangle of Sadness”.
Il est rejoint par deux autres films de stars montantes issues de l’immigration: “Boy from Heaven” du Suédois Tarik Saleh et “Holy Spider”du Danois-Iranien Ali Abbasi.
Les films scandinaves ont été un incontournable du Festival de Cannes au fil des ans.
Le Danois Bille August est l’un des rares à avoir remporté la Palme d’Or à deux reprises et Von Trier a remporté le premier prix en 2000 pour “Dancer in the Dark”, tandis que Bergman a été le tout premier récipiendaire d’une Palme d’honneur en 1997 pour son œuvre.
Les cinéastes nordiques “repoussent souvent les limites du langage cinématographique”, a déclaré Claus Christensen, rédacteur en chef du magazine danois Ekko.
“C’est du divertissement, mais (le but est) aussi de défier le public. Le réalisateur a la liberté d’explorer quelle que soit sa vision artistique”, a-t-il déclaré à l’AFP.
Abbasi, 40 ans, fait sa deuxième apparition à Cannes, après avoir remporté la section Un Certain Regard du nouveau venu en 2018 avec « Border », un film de troll-fantasy excentrique sur un garde-frontière.
Son nouveau film « Holy Spider “est l’histoire graveleuse d’un tueur en série” nettoyant » la ville sainte iranienne de Mashhad des prostituées de rue.
“Vous ne pouvez pas le pigeonner. Quand on pense l’avoir, c’est un métamorphe et il fait autre chose”, a déclaré à l’AFP son producteur Jacob Jarek.
Abbasi a récemment terminé le tournage d’épisodes de la prochaine série post-apocalyptique de HBO « The Last of Us », basée sur un jeu vidéo.
Cette polyvalence définit les autres de sa génération, a déclaré Jarek.
– Perspectives des immigrants –
La vague précédente de cinéastes danois, tels que von Trier et Thomas Vinterberg, a acquis une renommée internationale avec le mouvement Dogme, qui a établi des règles de réalisation strictes visant à assurer le réalisme de leurs films.
Mais la nouvelle génération est “plus disposée à travailler avec le genre, à mélanger les genres: faire de la comédie et des trucs plus légers mélangés à des trucs sombres”, a déclaré Jarek.
Les films d’Abbasi et de Saleh s’inspirent fortement de leurs origines immigrées.
Abbasi a quitté Téhéran pour la Suède en 2002, tandis que Saleh est né à Stockholm d’une mère suédoise et d’un père égyptien.
L’expérience de Saleh était essentielle pour faire « Boy from Heaven », a-t-il déclaré à l’AFP.
“Je pense qu’il y a une raison pour laquelle beaucoup de réalisateurs, historiquement, sont issus de l’immigration, comme (Francis Ford) Coppola et Milos Forman”, a déclaré l’acteur de 50 ans.
“Vous êtes positionné à l’intérieur et à l’extérieur de quelque chose. D’une certaine manière, c’est le rôle du réalisateur… de voir à la fois les similitudes et les différences.”
– Monde caché –
« Boy from Heaven » est un thriller sombre situé au Caire qui suit un pauvre garçon qui a obtenu une bourse à la prestigieuse Université Al-Azhar, qui se retrouve entraîné dans une lutte de pouvoir brutale entre l’élite religieuse et politique égyptienne.
Être un étranger était crucial, a déclaré Saleh.
« Personne n’est jamais entré (à l’Université d’Al-Azhar) avec un appareil photo auparavant. (Un cinéaste égyptien) irait en prison s’ils le faisaient », a-t-il déclaré à l’AFP.
Ancien graffeur, Saleh a grandi avec un père cinéaste et a travaillé dans son studio de cinéma avant de fréquenter une école d’art à Alexandrie.
En plus de réaliser des épisodes de “Westworld” et “Ray Donovan”, son film de 2017 “The Nile Hilton Incident”, également situé au Caire, a remporté le Grand prix du Jury de Sundance.
Pendant ce temps, Ostlund, le doyen du trio avec six longs métrages à son actif, apporte son premier film en langue anglaise à Cannes.
« Triangle of Sadness » est une satire sur les passagers d’une croisière de luxe qui se retrouvent bloqués sur une île déserte, se moquant du monde de la mode et des ultra-riches, avec une critique cinglante de l’accent mis par la société sur la beauté.